Luzero

Lucero Roca
Origines

                     Je suis née dans un pays à la folle géographie : au Chili, un pays au bout du monde, une île dans un continent. À l'Est, l'immensité de la cordillère des Andes, à l'Ouest, l'océan pas du tout pacifique, au Nord, le coin le plus sec au monde, le désert d’Atacama, où la nuit est si vaste qu’on croirait toucher les étoiles, au Sud, le cap Horn et l’Antarctique. Des volcans et des tremblements de terre. Je suis née dans un pays d'extrêmes et cette nature sauvage a été mon premier lieu d'aventures et de rêveries. Je crois que cette folle géographie s'est inscrite dans mon corps et dans mon cœur pour toujours.

UNE VOCATION EN HERBE
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Petite, avec mes deux sœurs, on se costumait avec les vêtements de notre mère puis on faisait des représentations dans le jardin ou bien on allait dans la rue pour déposer des lettres d’amour à un certain DUC DE SAN FRANCISCO, pur produit de notre imagination. Ma mère nous amusait en nous faisant faire du théâtre et notre pièce favorite était « LE PETIT CHAPERON ROUGE » que je vais jouer 50 ans plus tard avec la compagnie LA TENDRE. Vers10 ans, pendant la dictature, mes parents participaient à une activité ludique et créative avec des victimes de la répression, on y allait en famille tous les samedis. Mon père faisait partie de ceux qui animaient l’atelier théâtre. Je me rappelle d’une représentation où j'en faisais des tonnes. Ça faisait rire les gens. J'aimais aussi chanter, et avec ma guitare, je participais aux fêtes de mon école. Pourtant, l’idée de devenir comédienne ou artiste ne m’est jamais venue à l’esprit. L'idée a germé dans la tête d'un professeur d’histoire qui était très aimé des lycéennes parce que c'était le seul avec qui nous avions le droit de réfléchir et questionner le monde. Il m’a demandé ce que j’allais faire après le lycée. Moi, je n'en n’avais aucune idée et avec mes notes, je n'avais pas un très large choix. Il m'a dit : pourquoi ne ferais-tu pas du théâtre ? Ça alors ! S’il m'avait dit dresseur de poissons, j’aurais eu la même réaction. J'en suis encore étonnée, je ne sais pas d’où lui est venue cette idée, n’empêche je m’inscris dans deux épreuves : prof de gym et comédienne. Je réussis la gym, mais l’idée de faire du théâtre me titille plus. Je suis la dernière sur la liste d’attente en théâtre, j’ai déjà dit non à la gym… La place se libère, ouf, je suis prise et voilà comment débute ma vocation.

ARRIVE EN FRANCE
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À 19 ans, après avoir vécu 10 ans sous la dictature, je pars en France. Mes parents m’offrent la possibilité de partir en m’offrant un billet aller-retour ouvert un an, pour le reste c’est à moi de me débrouiller. J’ai dit OUI, et pour la suite on verra. La petite graine du regard du clown qui dit toujours oui, était peut-être déjà là ? Puis à cet âge, on ne refuse pas cette chance. Je ne parle pas un mot de français. La France est pour moi une montgolfière qui vole au-dessus de la tour Eiffel avec Maurice Chevalier dedans. J’atterris à Paris le 7 octobre 1983, j’entends toutes les langues possibles dans le métro, pour voir le ciel il faut regarder en haut, je suis fascinée et si étonnée. Les yeux grands ouverts, devant la Porte de Saint Martin, « dis donc, il n’y a pas de quoi en faire tout un plat avec leur Arc de Triomphe, il est vraiment tout petit. » Candeur ou naïveté, à vous de choisir.

L'ECOLE DE THEATRE
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Je fais toutes sortes de petits boulots pour payer le loyer et l’école de théâtre. On me fait travailler sur les fables de La Fontaine, je ne comprends pas grand-chose, « mais c’est du français ça ? » Plus tard, je vais l'adorer cet homme qui écrit à l’envers et qui parle si bien de l’âme humaine. La fable « Le petit poisson » fera longtemps partie de mon répertoire clownesque. Faut s’accrocher, ce Paris cosmopolite n’est pas toujours très curieux des étrangers, mais il y a tellement de possibles ici. 1er prix féminin à la sortie de 4 ans de cours de théâtre. Je rentre à l’Institut des Études Théâtrales à Censier, la chance me sourit toujours, je rentre directement en 2ème année de DEUG sans passer le test écrit de français. Heureusement, je ne l’aurais jamais réussi, je savais à peine aligner deux mots en français, mais encore une fois je dis OUI et pour la suite on verra. Je remercie la patience de mes professeurs pour déchiffrer mes copies.

MES DEBUTS A LA CARTOUCHERIE DE VINCENNES
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Après 10 ans d'études, toujours rien sur scène, je commence à me demander ce que je fais en France, et là on me propose une audition au Théâtre de l’Épée de Bois à la Cartoucherie. Je suis engagée pour une pièce en espagnol, je vais enfin pouvoir jouer. Le premier rôle de ma vie c’est ROSAURA dans LA VIE EST UN SONGE de CALDERON DE LA BARCA. Un monument du théâtre classique espagnol. Rien que ça ! Merci la vie. Quand j’étais petite, j'adorais jouer dans les terrains vagues avec mes sœurs et découvrir des trésors. J’ai le souvenir d’une phrase de PETER BROOK, où il évoqué le terrain vague comme cette page blanche où tout est possible. Avant d’intégrer la troupe du Théâtre de l’Épée de Bois, j'avais écrit une lettre à Peter Brook. J’avais vu tout ce que j’avais pu sur son travail que j’admirée. Puis toute tremblante de peur, j’avais réussi à lui donner en mains propres à la sortie d’une projection d’un de ses films. Il m’avait remercié et j’étais repartie à toute allure, j'étais au top de ma hardiesse. Dans cette lettre, avec un CV plutôt inventé, je lui manifestais toute  mon admiration pour son travail puis je lui proposais mes services en tant que comédienne. Il n’a jamais répondu, si ça se trouve j’avais oublié de mettre mes coordonnées. Je crois que la naïveté et la prétention du clown étaient déjà bien présentes en moi. En 1992, je suis à la CARTOUCHERIE de Vincennes, à ce moment-là, la vie de troupe me convient tout à fait. Tout le monde fait tout : jouer, fabriquer des accessoires, créer des costumes, régies lumière, administration, accueil des compagnies, création des affiches, etc.Cette expérience m’a beaucoup appris en autonomie et à faire même quand je ne sais pas faire. Encore à l’Épée de bois je joue avec le Théâtre à Bretelles dirige par Anne Quesemand et Laurent Berman dans le « Prisonnier de Saint Jean d’Acre », Anne ne l’as jamais su mais certains échanges avec elle, m’ont marque et au bout de 8 ans, je décide de partir, je sais qu’après cette vie théâtrale monastique, ce sera à nouveau la galère, mais je me sens enfermée, il me faut plus d’horizon.

DES NOUVELLESRENCONTRES ARTISTIQUES

Après avoir un passage par la troupe de théâtre-chant, Jolie Môme, je fais la rencontre de Fred Robbe et je deviens co-fondatrice du Théâtre du Faune dont l’un des axes principaux est la création, la recherche et la formation en clown. Cette rencontre sera déterminante dans mon amour et découverte du clown. Je fais le regard extérieur de « Paris-Arras,Aller-Retour », solo d’acteur avec Fred Robbe. Je crée « Rosalie et Mr Jo », spectacle de clown et marionnettes jeune public où je me lance dans la création de marionnettes. Avec Fred Robbe, on crée «Emballages » (spectacle à 5 clowns), pour lequel je réalise costumes,masques et maquillages grâce à une formation au Conservatoire du maquillage. Actuellement,je continue à explorer cette voie en créant des maquillages et des nez pour les clowns, et notamment ceux du spectacle « Le titre est dans le coffre ». J’ai toujours aimé les rôles de composition.

LA NAISSANCE DE HUACHACA

Le travail du clown me fascine, je me rends compte à quel point cet outil permet une créativité incroyable en même temps qu’il révèle notre être intime et notre humanité. Je me sens plus libre reliée aux autres. L’envie me prend d’être l’auteure de mes histoires. Par la suite, la rencontre avec Michel Dallaire va me faire pousser des ailes, j’ose aller à la rencontre du public. Pendant 5 ans, avec d’autres artistes, j’improvise en clown dans le Grand Bazar Vivant, spectacles de philosophie, clown et chansons sur la Péniche Antipode,  Paris. Ce fut une expérience très riche car chaque mois le collectif crée un nouveau spectacle, ce voyage permettra la création du personnage de Huachaca.

LA RENCONTRE AVEC SOPHIE GAZEL
HUACHACA UNE RENCONTRE AVEC MA SPIRITUALITÉ

UNE AMITIE ET COMPLICITE ARTISTIQUE QUI SE PROLONGELE CLOWN le chemin du cœur



Cela ne m’empêche d'être comédienne durant 8 ans, avec le Théâtre Organic compagnie franco-argentine dans le spectacle « Ils ne mouraient plus mais étaient-ils encore vivants » mis en scène par Sophie Gazel. En 2017, j’ose plus et je crée le solo de clown « HUACHACA Guérisseuse clandestine » chamane sans domicile fixe qui rêve de s’intégrer dans le pays de l’amour et surtout trouver un français pour avoir ses papiers.


HUACHACA
est un être très connecté à la nature et au spirituel et grâce à elle je vais me reconnecter à mes origines chiliennes que je croyais perdues. Huachaca est animiste et vit entourée des esprits, ses compagnons de route. C’est Huachaca qui orientera mon attirance pour les chemins spirituels. Je vais à la rencontre de shamans, de guérisseurs et d’humanistes. Je fais également partie du groupe d’inspiration féminine de l’école de médecine chinoise Neijing France « Les mers éveilleuses », un groupe humaniste qui travaille sur le féminin sacré. Cette quête va faire que pendant 4 ans je vais participer à la cérémonie de la lune rituelle féminine au Mexique. Chaque année, 4 jours et nuits rassemblent plus de 1000 femmes venues du monde entier.Ce qui semble être au départ des mondes qui n'ont pas de raisons de se croiser,va petit à petit former « un grand tout » où mon chemin de vie, mon chemin artistique et spirituel s’entrelacent, se croisent,  cohabitent et ne se quittent plus. HUACHACA est un être très connecté à la nature et au spirituel et grâce à elle je vais me reconnecter à mes origines chiliennes que je croyais perdues. Huachaca est animiste et vit entourée des esprits, ses compagnons de route. C’est Huachaca qui orientera mon attirance pour les chemins spirituels. Je vais à la rencontre de shamans, de guérisseurs et d’humanistes. Je fais également partie du groupe d’inspiration féminine de l’école de médecine chinoise Neijing France « Les mers éveilleuses », un groupe humaniste qui travaille sur le féminin sacré. Cette quête va faire que pendant 4 ans je vais participer à la cérémonie de la lune rituelle féminine au Mexique.Chaque année, 4 jours et nuits rassemblent plus de 1000 femmes venues du monde entier.Ce qui semble être au départ des mondes qui n'ont pas de raisons de se croiser,va petit à petit former « un grand tout » où mon chemin de vie, mon chemin artistique et spirituel s’entrelacent, se croisent,  cohabitent et ne se quittent plus.


La complicité avec
Sophie Gazel du Théâtre Organic se poursuit, s'enrichit, nous travaillons actuellement à un deuxième solo pour HUACHACA : « À TRAVERS LES ARBRES... la lumière passe encore », spectacle où la nature est mon partenaire. Mélange d'humour incisif, d'espiègleries, de poésie et de traditions chamaniques. Tout en restant au sein du THÉÂTRE DU FAUNE, je réactive LE THÉÂTRE HASTA pour cette nouvelle création. À l’initiative de l’Association POINT DE FUITE, la nouvelle compagnie de Sophie Gazel, et le THÉÂTRE HASTA nous lançons la 1ère Édition du FESTIVAL FORÊTS D'OTHE À CIEL OUVERT


Pourquoi le clown me touche tant ? Peut-être parce que dans ce monde hyper matérialiste dans lequel on vit, le clown est ce poète qui ne sert à rien. Il est en chacun de nous, ce poème que chacun de nous écrit sur un petit bateau en papier, ce poème qui part voguer dans l’immensité de l’océan. Il faut du courage pour aller à la rencontre de celui que nous sommes. Pour aller rencontrer cette part de nous pas encore domptée. Il faut du courage pour aller à la rencontre de notre lumière mais aussi de notre part d'ombre. Avec pour seule boussole notre grand cœur, qui redonne tant d’espoir car pour le cœur du clown, tout est possible.